samedi 11 décembre 2010

Climat. Enfin, un accord sort de Cancun

Après le fiasco de Copenhague, l'an dernier, la conférence de Cancun, au Mexique, sur le climat a débouché sur un accord. Le texte adopté prévoit la création d'un Fonds vert et un dispositif de lutte contre la déforestation.

Les conférences internationales sur le réchauffement climatique se suivent et ne se ressemblent pas. Si, il y a un an, Copenhague s'était achevé dans les invectives, Cancun s'est clos dans les applaudissements.


Limiter la hausse de la température

Le texte de compromis mis sur la table par le Mexique, hôte de la conférence, a été adopté à une écrasante majorité par les 194pays de la convention de l'Onu sur le climat. À l'issue de douze journées de négociations intenses et parfois tendues, les participants ont en effet adopté, hier, une série de mécanismes - encore embryonnaires - pour lutter contre le changement climatique, un accord accueilli par une ovation et salué par les dirigeants internationaux. «On sauve de la faillite le système multilatéral de négociations sur le changement climatique», s'est félicité la ministre française de l'Écologie, Nathalie Kosciusko-Morizet. La principale vertu du texte, adopté en dépit de l'opposition de la Bolivie, est d'inscrire dans le marbre de nombreux points de l'accord politique de Copenhague, qui n'a jamais été adopté par la convention de l'Onu. C'est en particulier le cas de l'objectif de limiter la hausse de la température moyenne de la planète à 2°C au-dessus des niveaux pré-industriels. «Les parties doivent agir de manière urgente pour atteindre cet objectif à long terme», indique l'accord adopté.

Un Fonds vert

Le texte prévoit aussi la création d'un Fonds vert pour aider les pays en développement à faire face au réchauffement. Ce Fonds aura un conseil d'administration avec représentation équitable entre pays développés et en développement. La Banque mondiale servira d'administrateur intérimaire durant trois ans. Les questions de son financement demeurent toutefois en suspens. A été suggérée la mise en place de financements alternatifs, comme des taxes sur les transports et les transactions financières. L'accord de Cancun pose par ailleurs les bases d'un mécanisme visant à réduire la déforestation à l'origine d'environ 15% à 20% des émissions globales de gaz à effet de serre (lire ci-dessous). Le texte permet aussi de désamorcer, au moins temporairement, à la faveur d'une formule ambiguë, la «bombe» de l'avenir du protocole de Kyoto, seul traité juridiquement contraignant sur le climat existant à ce jour, et qui menaçait l'issue des discussions à Cancun. Un sujet qui ressurgira immanquablement lors du prochain grand-rendez-vous climat, fin 2011, à Durban, en Afrique du Sud.


Les forêts du monde vont avoir un prix

Donner un prix aux arbres pour cesser de les couper, et ainsi en finir avec l'une des activités les plus néfastes pour le climat: discuté de longue date, ce mécanisme a, enfin, été lancé à Cancun. Le mécanisme REDD+(Réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation des forêts) a été adopté, hier. L'idée est d'amener les pays qui abritent de précieuses forêts tropicales, comme le Brésil, l'Indonésie ou les pays du bassin du Congo, à éviter de les couper ou à les gérer de manière durable, en leur versant des compensations financières. Car déboiser génère jusqu'à environ 20% des émissions globales de gaz à effet de serre, à l'origine du changement climatique. Et quelque 13millions d'hectares de forêts, soit l'équivalent de la taille de la Grèce, disparaissent chaque année dans le monde. Des questions épineuses restent toutefois à régler. La première d'entre elles est le financement. Pour l'heure, il n'est surtout question que de préparer le terrain dans ces pays: photos satellites des forêts, adoption de lois... Mais, à terme, ce mécanisme coûtera des dizaines de milliards par an. «Est-ce que le Fonds vertsera au coeur?» s'interroge Jérôme Frignet, de Greenpeace. Se pose aussi la question de la protection des populations autochtones qui vivent dans et de la forêt. L'accord de Cancun prévoit des «clauses de sauvegarde», qui ont été poussées par la Bolivie, seule voix discordante dans ce concert de satisfecits. Mais comment pourra-t-on vraiment s'assurer qu'elles sont respectées, tout en veillant à «la souveraineté» des pays forestiers, comme le prévoit le texte?