«Si l’on agit pas maintenant, l’urbanisation risque de venir une autre occasion manquée de Madagascar ». C’est en ces termes de l’économiste principal de la Banque mondiale, Jacques Morisset a évoqué le grand défi qui attend le pays en matière d’urbanisation. Hier à l’hôtel de ville de la capitale, l’équipe de la Banque
mondiale a présenté son rapport sur « L’urbanisation ou le nouveau défi malgache ». Pour la capitale, l’investissement communal n’est que de 4 dollars par habitant par an pour 2,5 millions d’habitants. C’est un montant modeste pour ne pas dire ridicule quand on sait que d’ici 2025, elle abritera 10 millions d’âmes et qu’elle accueille d’ores et déjà 100 000 nouveaux habitants par an, que ses taxi-be transportent 700 000 personnes par jour… De plus, la moitié des Malgaches habiteront la ville dans moins de 10 ans. Ces données signifient qu’il faut des emplois, des infrastructures socioéconomiques et d’autres services et offres à même de donner des réponses satisfaisantes à ces réalités et à ce futur qui n’est plus dans le lointain. Mais pour l’heure, le pays ne dispose d’aucune politique d’urbanisation, alors que les villes attirent pour différentes raisons.
Les gens y sont en moyenne plus riches avec des revenus 40% supérieurs à ceux de la campagne. Les opportunités d’emplois sont plus importantes et diversifiées, les infrastructures comme les écoles et les routes sont concentrées dans les villes. Certes, les villes comptent beaucoup d’inégalités avec un écart salarial de 12 contre 3 dans les campagnes, mais la Banque mondiale souligne que l’urbanisation est une opportunité à saisir et un défi à relever. En effet, les villes concentrent 3/4 des entreprises. L’esprit d’initiative en matière de création d’entreprises y est présent et se chiffre à 1 pour 900 habitants. Ce contexte offre de grandes opportunités d’emplois et de croissance à condition de lever plusieurs obstacles qui touchent plusieurs secteurs dont l’environnement des micro et petites entreprises. Parmi ces problèmes, l’on peut citer les lacunes dans l’accès au crédit, à l’information et aux marchés, la formation, l’absence de réseaux, etc. Les villes ne mènent pas non plus des politiques de proximité. Afin d’exploiter au mieux les opportunités offertes par l’urbanisation, le rapport recommande de rationaliser les procédures administratives et de promotion en les décentralisant jusqu’au niveau local, appuyer les micro et les PME, sécuriser et rendre flexible l’usage du foncier via des procédures allégées et des informations transparentes, fluidifier les transports urbains… Sur le plan social, les infrastructures doivent aussi suivre l’évolution de la ville. D’ici 2020 en effet, les centres urbains accueilleront, par exemple, 55% d’étudiants... Deux photos publiées côte à côte dans le rapport montrent à quel point Madagascar est terriblement en retard en matière d’urbanisation. Ces photos sont similaires en ce sens qu’elles étalent la misère urbaine. Leur seule différence porte sur les dates et les lieux : la 1ère photo est celle de Paris en 1903 et la 2ème celle d’Antananarivo en 2010. Bref, les villes malgaches sont loin d’optimiser les effets d’agglomération. Le rapport de la Banque leur offre un outil pour y voir plus clair et établir des politiques.