mardi 14 juin 2011
Onja Harinala Razafindratsima « Mon étude servira à la préservation des lémuriens »
Cette étudiante en PhD à Rice University à Houston, Texas, livre le déroulement de ses recherches.
Comment se passe généralement une journée de la vie d’une étudiante aux Etats-Unis ?
Le réveil est à 6 h. Puis préparation du repas que je dois apporter à l’université pour le déjeuner. Entre-temps, je vérifie mes emails. Pas le temps de prendre le petit-déjeuner, donc j’emporte avec moi une tasse de thé chaud à la cannelle ou à la vanille de Madagascar dans un thermos-tasse que je boirai en route ou au bureau que je partage avec un autre étudiant près de celui de notre encadreur académique. Je quitte la maison vers 7 h 30 tous les jours. Ma journée se résume à aller en classe pour prendre certains cours, faire des recherches au laboratoire, des recherches bibliographiques, écrire des rapports de recherche, écrire des demandes de financement pour mes travaux de recherches, assister et participer aux réunions avec des collègues et encadreur et assister à des séminaires. Je termine ma journée soit en allant à la réunion des étudiants chrétiens de l’Université ou à la réunion des chrétiens de notre église, soit en trainant un peu avec les collègues. Retour à la maison au plus tôt vers 19 h pour finalement m'occuper du dîner et puis continuer ce qui n’a pas été fini au bureau le jour tout en appréciant un peu des séries TV ou des films.
Y avait-il un effort particulier à fournir par rapport au niveau international de vos études ?
Au début, j’ai été acceptée pour un programme de Master à Rice U. alors que j’ai déjà obtenu mon Diplôme d’études approfondies (DEA) en Biologie, écologie et conservation animale à l’Université d’Antananarivo. DEA est pratiquement l’équivalent d’un diplôme de master, mais le département pensait que mon niveau était un peu en-dessous des étudiants américains préparant un doctorat. Mais après une année d’études, ils ont revu mon cas et ont décidé de me promouvoir directement en tant qu’étudiante en doctorat après avoir apprécié tous mes efforts pour être au même niveau. Ce qui était dur pour moi était d’abord l’anglais. Tout étudiant doit passer un test de niveau avant leur inscription pour être admis dans une université américaine. Pour mon niveau (c’est-à-dire étudiant potentiel en doctorat ou master), c’était le test GRE (Graduate Record Examination) que je devais passer. C’était un peu dur à cause de la partie analytique qui consiste à analyser des mots anglais, et certains sont des mots vraiment très nouveaux pour moi (j’ai déjà même lu et appris à peu près 5 dictionnaires pour la préparation).
Quel est le handicap d'un étudiant malgache ?
Du point de vue formation universitaire, je trouve que les étudiants malgaches manquent de formation et d’applications sur l’utilisation des packages statistiques, des modélisations et simulation sur ordinateur (méthodes innovantes en écologie et gestion de la biodiversité) et l’utilisation pratique de logiciels écologiques et biologiques. En plus, les systèmes éducatifs malgaches et américains sont très différents et j’ai dû donc m’adapter au nouveau système. Différent parce qu’aux Etats-Unis, les étudiants sont vraiment responsables de leurs études, de leur réussite et de leur propre planning. Ils doivent conduire des projets indépendants pour la plupart des cours.
Pourquoi étudier les lémuriens ? Vos choix et vos motivations ?
Etant une native de Madagascar et ayant été en contact avec la biodiversité depuis des années en tant que membre du Club Vintsy au lycée, j’ai été fascinée par la beauté de la biodiversité à Madagascar. De même, je suis consciente des dangers qui entraînent le déclin de la population des lémuriens. En plus, j’ai appris pendant mes années universitaires et mon projet indépendant de DEA qu’ils jouent un rôle écologique très important dans le maintien de l’écosystème. De ce fait, je suis convaincue de contribuer à la préservation de ces espèces endémiques et unique de Madagascar afin de réduire les menaces qui les rendent en danger à partir de mes connaissances, formations et recherches.
A quoi vous attendez-vous de vos recherches sur le plan national et international ?
Une partie de ma dissertation de doctorat concerne les mécanismes de dispersion de graines par les lémuriens en apportant de nouvelles approches et perspectives pour analyser et expliquer le fonctionnement de l’écosystème. Cette étude démontrera les probables conséquences de l’extinction des lémuriens sur les communautés écologiques et prédira le taux de croissance des plantes consommées et dispersées par les lémuriens suivant différents scenarios (présence/ déclin/extinction des lémuriens). Donc, au niveau national, mon étude servira d’informations importantes pour la préservation des lémuriens et de leur habitat parce que le maintien de l’interaction lémuriens-plantes est critique pour la persistance de milliers d’espèces animales et végétales. De plus, la connaissance des caractéristiques de cette interaction pourra aider d’autres biologistes ou des gens de la conservation à la sélection des espèces de plantes importantes pour la restauration d’une forêt fragmentée, et qui attireraient les espèces de lémuriens frugivores (consommant des fruits) afin que celles-ci puissent disséminer les graines. Du point de vue international, mon étude pourrait servir de modèle qui peut être utilisé dans la conservation d’autres systèmes forestiers.