mardi 14 juin 2011

Visite nocturne de la forêt de Ranomafana



Paradis des chercheurs, la forêt de Ranomafana devient un autre monde, la nuit. Ambiance de recherche nocturne avec le doctorant Serge Andriantsoa.

Il faut de la passion pour faire ce genre de chose. Serge Andriantsoa réalise des recherches en vue d'un PhD dans le domaine environnemental, en collaboration avec l'Université de Hambourg, Allemagne. Pour ce faire, il doit réaliser des expéditions de nuit à travers la forêt du parc national de Ranomafana.

Il est 19 h et quelques minutes. En cette soirée de samedi, il va entrer dans une forêt fragmentée et faire une heure de marche environ. Le site n'est pas loin. Le ciel semble être béni ce jour.

« Des fois, lors des saisons pluvieuses, on doit aller dans les forêts primaires, alors c'est la galère avec les trombes d'eau, les hors pistes improbables … », indique t-il. À bien des égards, une recherche dans ces conditions ressemblerait plus à un parcours de commando qu’une simple étude d'une espèce de grenouilles ou de lémuriens.

Avant chaque expédition, Serge Andriantsoa se prépare. Il contrôle son matériel, un mini micro ultra performant de marque Rode, ses documents, les bottes de rigueur, les lampes d'éclairage ou « head lamp ». Ceci fait, il quitte le centre Valbio pour quelques heures.

Dans sa quête, le jeune homme semble se fier à l'instinct. Il repère un cours d'eau et avance avec des mouvements millimétrés. Pas besoin de suivre une piste, il éclaire de sa torche les pieds d'arbre, les feuilles au-dessus du ruisseau, les bottes sous 20 à 30 cm d'eau. Il cherche simplement des grenouilles.

Synchronisation

Sa méthode consiste à ne pas effrayer les bestioles. Il lui a fallu une formation pour pouvoir marcher comme il le faut.

« Je suis souvent accompagné. Mes accompagnateurs et moi avions dû apprendre à synchroniser notre manière de marcher durant deux mois pour réussir les recherches », explique t-il.

Pour un parcours de 50 m, il faut pas moins d'une heure quand Serge Andriantsoa et son équipe ne rentrent pas bredouilles.

En chemin, il repère une araignée menaçante. « Nous n'avons pas d'espèces mortelles mais il y a celles qui piquent », révèle t-il. Pour dégager l'insecte, il prend une grande feuille et enveloppe la bête. Tout en douceur, il pose l'araignée sur le sol, mais plus à l'écart de son chemin. Ce passionné de grenouille aime aussi la nature, et dans son cas, il le faut.

Pour se faire plaisir, Serge Andriantsoa entre dans une forêt qui se rapproche des jungles primaires. Derrière, en bruit de fond, une chute d'eau rugit et glace le sang du non-initié. Le comble dans la forêt, c'est que dès qu'on éteint les lampes, on n'arrive plus à se voir à plus d'un mètre.

« Nous ne devons pas nous aventurer plus loin, car je n'ai jamais emprunter cette forêt. Et nous risquons de nous perdre », prévient-il.

Dans la jungle, la nature reprend ses droits. Faire comme Rambo, se balader, torse nu, en voulant échapper à une armée d'hommes déchaînés est impossible dans la jungle. « Dans les forêts primaires, c'est impossible d'apercevoir le ciel. Car les branches des arbres vous recouvrent. Alors rester deux semaines dans la forêt cela vous change un homme », rigole-t-il.

Vers 22 h, Serge Andriantsoa réapparaît au centre Valbio. Presque aussi simplement qu'il était parti.