lundi 18 octobre 2010

Culture de tabac: Madagascar s’oppose aux recommandations de l’OMS

Les pays africains producteurs de tabac ont dénoncé à l'unanimité l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), en déclarant que l'interdiction proposée de certains ingrédients utilisés dans la fabrication de produits du tabac renforcerait activement la pauvreté.

Réunis à l'occasion d'une conférence organisée à Lusaka, en Zambie, les délégués de onze pays africains, dont la Zambie, le Zimbabwe, la Tanzanie, le Mozambique, le Malawi, l'Ouganda, Madagascar, le Swaziland, la Côte d'Ivoire et l'Éthiopie, ont pris la décision de s'opposer aux recommandations de l'OMS.

De hauts responsables des gouvernements de ces pays vont à partir de maintenant écrire à l'OMS des lettres de caractère urgent, dans l'espoir de faire entendre les voix de leurs pays en opposition aux propositions de l'OMS.

Les Articles 9 et 10 de la Convention-cadre pour la lutte antitabac (CCLAT) de l'OMS, qui traitent des additifs et ingrédients entrant dans la composition des produits du tabac et également des émissions de ces produits, interdiraient dans les faits l'utilisation d'ingrédients autres que le tabac dans la production de cigarettes.

Ces ingrédients sont nécessaires à la fabrication de certains mélanges, composés essentiellement de tabac des variétés Burley et Oriental et qui représentent plus de la moitié des cigarettes fumées dans le monde. Avec cette interdiction, les producteurs de tabac Burley et Oriental verraient disparaître la demande pour leur production. La mise en?uvre des articles de la CCLAT de l'OMS entraînerait une menace de famine pour des millions de producteurs de tabac africains.

Le tabac est une culture de rapport pour des milliers d'agriculteurs en Afrique, et aucune autre culture ne procure un revenu à ces planteurs ayant des exploitations particulièrement exiguës et qui assurent des moyens de subsistance à des villages entiers.

« Ce à quoi nous sommes confrontés en tant que producteurs n'est rien moins que notre disparition, qui se traduirait par d'importantes retombées négatives pour les perspectives économiques de ces régions. Ce qui est en jeu, ce sont des emplois, des revenus pour les pouvoirs publics ainsi que les investissements internationaux et locaux, a déclaré M. Knox Mbazima, Directeur général de l'Association du tabac de Zambie.

« Des centaines de milliers de producteurs de tabac africains seront contraints dans les faits à mettre fin à leurs activités du jour au lendemain. Les agriculteurs africains sont déjà désavantagés en raison des subventions agricoles àcause desquelles il est très difficile de trouver des alternatives viables. Dans la pratique, ces recommandations conduiront au renforcement de la pauvreté et de la famine en Afrique. »

M. Mwansa James Musonda, Conseiller commercial principal auprès de la COMESA (le Marché commun de l'Afrique de l'Est et de l'Afrique australe) a déclaré à l'occasion d'un sommet récent de la COMESA organisé au Swaziland que les 19 États membres s'étaient mis d'accord à l'unanimité pour s'opposer aux articles 9 et 10.

Il a exhorté les délégués à constituer des alliances, en compagnie d'organisations aux vues similaires, afin de présenter un front uni d'opposition à l'OMS. La COMESA a également appelé l'OMS à mettre en place des mécanismes de consultation appropriés afin que les parties concernées affectées puissent participer à l'avenir à toute élaboration de recommandations au sein de la CCLAT.

Les délégués à la conférence ont déclaré que les recommandations de l'OMS auraient des retombées majeures non seulement sur les planteurs de tabac mais aussi sur d'autres populations travaillant dans ce secteur d'activité.

Selon M. Mbazima, les articles proposés exposeront les agriculteurs africains à un enchevêtrement de pratiques illégales et de dépendance à l'égard de négociants sans scrupules, dans une situation où des populations pauvres se démèneront en vue de trouver un marché alternatif pour leurs récoltes de tabac.

« Des alternatives viables à la culture du tabac n'existent tout simplement pas à l'heure actuelle, d'autant plus qu'il n'y a pas de dépenses d'investissement prévues, que les marchés alternatifs sont saturés et que ces récoltes ne peuvent pas être comparées du point de vue de leur rendement économique.

Nous lançons à toutes les personnes vivant dans les régions productrices de tabac un appel afin qu'elles se joignent à notre lutte visant à obtenir le soutien d'autres pays en vue du rejet des recommandations proposées accompagnant les Articles 9, 10, 17 et qui font référence à des cultures alternatives », a déclaré M. Mbazima.

Les recommandations seront soumises au vote lors de la 4ème Conférence des Parties qui se tiendra en Uruguay en novembre 2010.

La Gazette de la Grande Ile