Une présentation du fondement du colloque a été effectuée par les chercheurs venant du CNRS et de l’Agro Paris Tech de Paris ainsi que de l’IRD Orléans. Le directeur général du FOFIFA a ensuite exposé les difficultés rencontrées par les chercheurs à Madagascar en matière d’environnement. L’après-midi trois thématiques ont été abordées. La première a concerné la représentation scientifique de la nature et la conservation de la biodiversité à Madagascar. Les auteurs (issus de l’IRD et de l’IHEID (institut des hautes études internationales et du développement) ont montré qu’à Madagascar, les biologistes de la conservation, dont le discours et l’idéologie dominent la scène publique, jouent un rôle déterminant dans la mise en agenda des politiques de conservation. Pourtant selon les expériences des auteurs la représentation des forêts par les biologistes et les acteurs de la conservation est fortement imprégnée par un idéal prédéfini, celui de la nature sauvage, ou naturalité.
Considérant les limites de cette représentation, des modes de gestion qu’elle préconise (aires protégées et corridors), et des concepts scientifiques sur lesquels elle s’appuie (théorie de la biogéographie insulaire et métapopulation), les auteurs recommandent le dialogue actif et opérationnel avec les scientifiques dont les représentations de la nature incluent l’homme aux socio écosystèmes.
Le second thème a traité de l’économie politique internationale de la conservation à Madagascar. L’auteur qui est un chercheur de l’IRD et qui a travaillé pendant longtemps à Madagascar a montré l’évolution de la politique environnementale à Madagascar depuis 1990 jusqu’à aujourd’hui. Il a cherché à montrer l’influence des normes internationales sur l’évolution de cette politique, en insistant sur le rôle croissant des acteurs non gouvernementaux tels que les ONG de conservation. L’auteur a spécifié que dans un premier temps (1990-2003), la politique environnementale a été menée dans le cadre d’un plan national d’action environnementale traduisant le poids d’acteurs étatiques. Madagascar pouvait alors être considérée comme un pays pionnier dans la mise en œuvre de cette planification. Mais depuis 2003, les orientations de la politique environnementale sont davantage le résultat d’influences des réseaux internationaux (ONG, scientifiques, FMN…) qui se traduisent notamment par la promotion des paiements pour services environnementaux.
Le troisième thème a eu pour sujet le foncier. L’accès coutumier aux ressources environnementales du territoire : défendre l’indéfendable ? Les auteurs issus du département de Droit de la faculté DEGS d’ Antananarivo ont montré qu’une réforme foncière importante a été promulguée à Madagascar à partir de 2005. Elle a visé à supprimer la présomption de domanialité publique pour celle de domanialité privée. Des structures ont été mises en place pour favoriser l’accession à la terre. Cette réforme n’a, cependant, pas été sans conséquence sur l’accès à la terre des ayants droit coutumiers. Des ambiguïtés ont subsisté, notamment l’absence des structures permettant de faciliter l’accession à la terre dans plusieurs régions de Madagascar, le coût énorme des moyens satellites requis, le devenir des droits acquis sous l’égide de la présomption de domanialité comme dans le cas de la loi dite Gestion locale sécurisée (GELOSE), la préservation des droits des propriétaires coutumiers lors des négociations sur la création des aires protégées et « l’accaparement » des terres par les investisseurs étrangers.
Les auteurs ont assuré qu’un développement durable nécessite la mise en place de mécanismes de reconnaissance des droits sur la terre et les ressources des propriétaires coutumiers. Les auteurs recommandent en outre qu’une collaboration fondée sur un respect mutuel entre l’Etat et les propriétaires et utilisateurs coutumiers doit être effective pour assurer une meilleure gestion des ressources environnementales.
Cette rencontre réunissant des spécialistes continue ce jour avec bien plus de cas sur Madagascar, notamment avec les présentations suivantes : « L’écologie politique et la question environnementale malgache», «La modélisation environnementale, un outil du politique», «Une mer à boire. L'influence sud-africaine à Madagascar», «Gouvernance et politique de la nature à Madagascar», «L’environnement, pour le développement ? Une analyse de la REDD à Madagascar ».
Et cette discussion entre plusieurs personnes sur le thème de l’Environnement sera clôturée par une série de présentation d’acteurs nationaux qui donneront leur vision des choses sur les projets de conservation-développement à Madagascar, notamment l’observatoire de l’Environnement et du Secteur forestier et l’observatoire national de l’Intégrité, le programme développement local et environnement de l’Union européenne et le Madagascar National Parks. Bref, un colloque qui, à défaut d’être à la portée du grand public, n’en promet pas moins d’améliorer la gestion de la protection de la nature à Madagascar.
Recueillis par
Saraléa Bernard.